Les plus belles créations naissent souvent d’un cerveau créatif et artistique. La mise en pratique s’avère généralement plus complexe et nécessite les bonnes définitions et questionnements pertinents pour réaliser tous les aspects de la solution souhaitée. Le projet COCON est un bel exemple de réussite. Chaque membre de l’équipe a sa spécialité mais également une affinité avec les spécialités d’autres collègues, nécessaire pour ‘se comprendre’ et avancer.

Le défi

Le projet COCON est né de la demande de huit violoncellistes à l’artiste Nick Verstand de rendre leur performance plus expressive et dynamique. Il s’agit de combiner une performance centrée sur le son et éventuellement des images en 2D à des mouvements en 3D. Une mission faite pour lui, qui s’inscrit dans son offre de compositions audiovisuelles spatiales particulières et attrayantes. Nick Verstand : « Mes créations sont souvent des installations autonomes via lesquelles j’explore la frontière entre le matériel et l’immatériel. L’interaction instantanée avec l’environnement est un défi que j’aime relever. »

Pour l’ensemble de huit violoncellistes, habituellement assis en demi-cercle, Nick Verstand a imaginé une configuration selon laquelle un bras long de 3,5 mètres placé derrière chaque musicien – une ‘sentinelle’ – évolue au rythme de la musique. Les immenses bras se déploient sur les violoncellistes comme des tentacules puis forment un cocon pour les cacher et les protéger. Les bras peuvent tourner sur leur axe et sont dotés d’une tête rotative pour créer des jeux de lumière et de fumée.

Nick Verstand: « Cette configuration présentait deux grands défis : la solution mécanique et d’entraînement devait permettre aux bras d’effectuer les mouvements souhaités et le pilotage de l’ensemble devait être hautement précis. Je ne voulais pas un mouvement préprogrammé des bras mais des mouvements instantanés définis par la musique et l’environnement. Les bras doivent évoluer de manière naturelle et fluide, au gré des notes et à la seconde près, et non de manière saccadée et lente comme une machine mal réglée. Il me fallait donc un système de commande extrêmement précis et de haute résolution. »

Mécanique et entraînement

Nick Verstand travaille avec Daniël de Bruin sur plusieurs projets. Cet artiste hybride et designer a de nombreuses constructions mécaniques particulières à son actif que des dizaines de milliers de personnes admirent sur les réseaux sociaux. Il s’inspire de ses propres idées et réflexions pour créer des concepts personnels et répondre aux demandes émanant du monde du spectacle et du théâtre. « Daniel comprend parfaitement mon approche artistique et est capable de la traduire en une technologie fonctionnelle », ajoute Nick Verstand.

Pour le projet COCON, un plan solide s’imposait. Daniël de Bruin: « Lors de projets précédents, nous nous sommes souvent heurtés aux limites des moteurs utilisés. Il manquait de la puissance, de la vitesse, du couple, de la précision, de la dynamique, de la flexibilité, …. Il fallait travailler autrement pour le projet COCON. Les bras doivent évoluer ensemble et en toute transparence, avec un maximum de précision et de fiabilité, d’autant plus que huit personnes jouent du violoncelle sous la construction. Une grande précision est nécessaire pour la synchronisation des mouvements de huit éléments et des jeux de lumière réalisés à partir de sources laser placées à quelques mètres de la scène. Les faisceaux laser émis sont captés et réfléchis par les petits miroirs dans la tête du bras. Le moindre écart de position d’un miroir dû à une rotation imprécise de la tête manque le faisceau laser et donc l’effet lumineux escompté. »

Un contact avec Festo

Comme aucune expérience n’avait été acquise avec les composants industriels, Daniël de Bruin a contacté Festo. « Lors de contacts antérieurs avec Festo, j’avais remarqué à quel point cette entreprise est ouverte aux demandes particulières. Je ne travaille pas pour l’industrie mais pour le monde du divertissement où les exigences sont élevées en termes de dynamique, d’esthétique, d’effets surprises, etc. C’est formidable qu’un fournisseur de composants techniques et de savoir-faire nous comprenne et puisse nous livrer ce que nous demandons. »

La bonne compréhension entre les deux parties est à la base de la réussite du projet. Festo s’est penché sur les questions techniques du concept. Quels sont les moteurs assez puissants capables de fournir le couple adéquat pour la flexion des bras ? Quels sont les moteurs assez rapides et précis pour réaliser la rotation des têtes à l’extrémité des bras ? Et quel est le système de commande assez rapide et dynamique pour réagir instantanément à l’environnement et à la musique ?

Commande

Cette dernière partie du concept a été réalisée via une collaboration entre Festo et Wes Broersen. À l’instar de Nick Verstand et Daniël de Bruin, Wes Broersen travaille pour sa propre entreprise en tant que technologue créatif, spécialisé dans le design interactif sonore. Il se consacre à la composition d’espaces intégrant de la lumière et du son en déployant la technologie, ce qui correspond bien aux développements de Nick Verstand. « Pour ces créations, j’utilise Touch Designer, une solution logicielle dédiée au monde du divertissement, où l’esthétique et les effets spéciaux sont centraux. Le projet COCON prévoyait un pilotage dynamique. Comme déjà mentionné, je ne voulais pas de mouvements préprogrammés de A vers B mais des mouvements déclenchés par des indices spécifiques dans la musique ou simplement en temps réel et manuellement à l’aide d’un joystick. »

À partir de l’animation réalisée par Wes Broersen dans Touch Designer, Festo a sélectionné le contrôleur adéquat répondant aux exigences en termes de dynamique et de précision (de répétitivité).

Résultat final

La solution finale comporte huit bras d’une longueur de 3,5 mètres, placés derrière huit violoncellistes. Chaque bras comporte trois points d’articulation pour permettre une flexion vers l’avant. Les bras peuvent pivoter jusqu’à 80° sur leur axe. À leur extrémité, ils sont équipés en option d’une tête rotative à deux axes dans laquelle sont logés les miroirs et le jet de la machine à fumée. Nick Verstand : « Au total, 32 moteurs sont utilisés pour les huit bras que nous contrôlons selon une précision de 0,01 mm sur l’actuateur. Ceci, associé au système de commande de Festo, permet aux bras d’évoluer en douceur, de manière naturelle et instantanée ; une expérience unique pour nous et un résultat final impressionnant. » Wes Broersen ajoute : « Festo a su traduire les animations de mon logiciel en données qu’un contrôleur industriel peut traiter et utiliser pour piloter les entraînements. C’était pour moi un sérieux défi mais nous y sommes parvenus, avec la précision et la résolution utiles. Daniël de Bruin conclut : « En ce qui nous concerne, il s’agit d’un résultat final très satisfaisant pour l’une des plus grandes missions que nous ayons réalisées ensemble, et la collaboration avec Festo nous donne envie d’aller plus loin. »

Pour les jeunes artistes, la concrétisation du projet COCON n’est pas un point final mais une source d’inspiration pour de nouvelles idées. Ils savent désormais ce qu’il est possible de faire avec les techniques disponibles chez Festo. « Cela nous donne de la certitude pour réaliser des constructions plus complexes. »

Aspect technique du projet COCON

Le pilotage simultané des huit bras et les mouvements synchronisés en 3D est un beau défi que les ingénieurs de Festo ont relevé.

La solution pour la flexion des bras a été trouvée dans l’application d’une broche électrique et d’un servomoteur de 48 V. Alors que les moteurs sont assez puissants pour générer les couples requis, le principe d’asservissement avec retour d’information permet d’obtenir la précision (de répétitivité) souhaitée. La tête de chaque bras abrite deux actionneurs de broche sur les côtés pour réaliser la rotation souhaitée.

L’intelligence permettant aux bras de suivre la musique ou le joystick est logée dans la commande de mouvement globale CPX-E. Celle-ci reçoit les signaux du logiciel d’animation et les traduit en une trajectoire de mouvement. Les points sont redéfinis toutes les 4 millisecondes. La puissance de calcul est utilisée pour l’interpolation permanente et l’aplanissement des pics et des creux afin de passer au point suivant en douceur, que le bras y parvienne ou change de cap à mi-parcours. Le PLC et le contrôleur de mouvements en douceur sont programmables en fonction des besoins, de sorte que les bras peuvent fonctionner de manière autonome. C’est par exemple intéressant lors d’une performance souvent jouée de la même manière sur scène.